jeudi 22 septembre 2016

Justice pour tous

Je ne peux pas croire à quel point le temps passe vite! Il ne reste qu’une semaine à notre cours et ensuite, je continue mon aventure en Inde par moi-même. Je ne suis toujours pas certaine de ma prochaine destination, mais je sais quelles sont mes options. Pour l’instant, je tente de focaliser mon énergie sur l’expérience que je suis en train de vivre avec Bala Vikasa. Chaque jour, je me réveille avec le sentiment que je suis bénie par la vie d'être en Inde, en train de faire ce cours et de rencontrer de si merveilleuses personnes. Chaque soir, je me couche avec un cœur reconnaissant et un sourire immense. C’est un sentiment incroyable. 

Pour cet article, j’avais envie de vous parler de notre visite de la semaine passée, lorsque nous sommes allés rencontrer un groupe de veuves. Nous sommes allés en apprendre davantage sur le programme d’aide aux veuves de Bala Vikasa. Ce programme tente de favoriser l’autodétermination de celles-ci notamment par des cours en programmation neurolinguistique,  des séances de thérapie, des rencontres de groupe et des cours de yoga.

Pourquoi un programme spécifiquement pour les veuves? Aussi surprenant que cela puisse paraître pour nous, la discrimination envers les veuves est un sérieux problème en Inde, tout particulièrement en milieu rural. J’étais moi-même très surprise de constater l’ampleur de ce problème dont je n’avais jamais entendu parler avant ce cours. En fait, les veuves vivent de nombreuses inégalités sociales puisqu’elles sont considérées comme prophètes de malheur. Elles sont souvent rejetées par la société et par leur voisinage. Notamment, lorsqu’une femme perd son mari, la belle-famille la renie prétendant qu’elle a causé la mort de leur fils. Aussi, celle-ci ne peut plus porter les bijoux traditionnels de l’Inde puisque la société considère qu’elle ne mérite pas cet honneur. Il ne s’agit que de quelques exemples de la discrimination dont elles sont victimes.

En conséquence, les femmes restent confinées à la maison de peur de sortir et de causer de la malchance à quiconque. Elles ne peuvent plus jouir des mêmes droits que n’importe quel autre être humain. La souffrance est donc énorme. D’ailleurs, selon un sondage fait par Bala Viksa, 29% d’entre elles ont déjà sérieusement pensé à s’enlever la vie. 

Imaginez un instant que vous perdez votre mari (ou votre femme), votre douce moitié, qui est probablement aussi le père de vos enfants. Son décès entraîne suffisamment de peine, n'est-ce-pas? Eh bien, imaginez qu’en plus, vous devez vivre avec le fait que tout le monde autour de vous vous rejete. Vous n’avez plus les mêmes droits. On ne veut plus que vous fassiez partie de la société. Vous devez également voir vos enfants en souffrir. Vous devez vivre avec le fait que personne ne veut être près de vous de peur que vous leur portiez malchance.

Ça ne fait aucun sens, n'est-ce-pas? Pourtant, c’est ce que ces femmes vivent.

Pendant notre visite (environ 100 d’entre elles étaient présentes), elles ont toutes fermé les yeux et ont répondu à des questions en levant simplement la main pour acquiescer. Par exemple, on leur a demandé de lever la main si elles avaient un enfant, deux enfants, trois enfants, etc. On leur a aussi demandé si leur conjoint était décédé depuis moins d’un an, moins de trois ans, etc. Vous saisissez le principe. 

Les réponses aux questions étaient saisissantes. 

Vous auriez été sous le choc de constater combien d’entre elles ont levé la main lorsqu’on leur a demandé si leur conjoint était décédé par cause d’alcoolisme.

Vous auriez été sous le choc de constater combien ont levé la main lorsqu’on leur a demandé si elles avaient été rejetées par leur belle-famille.

Mais par dessous tout, vous auriez été incroyablement peinés de constater combien ont levé la main lorsqu’on leur a demandé si elles avaient déjà tenté de se suicider.

C’était brise-coeur. En fait, brise-coeur n’est pas suffisant pour exprimer toute la souffrance que nous pouvions observer dans leur regard. Tout le monde avait les larmes aux yeux à ce moment-ci de la rencontre. 

Puis, quelques unes d’entre elles sont venues à l’avant afin de racontrer leur histoire. Encore une fois, nos cœur étaient en morceaux. Les larmes qui coulaient sur leurs joues et la souffrance qui se trouvait dans leur voix étaient indescriptibles. Certaines étaient si jeunes. C’était incroyable.

Toutefois, à partir de ce moment-là, quelque chose a changé. Plus fort que la souffrance, nous avons commencé à ressentir l’espoir. 

Elles ont commencé à nous raconter comment Bala Vikasa avait changé leur vie et leur avait apporté réconfort et espoir. Comment certaines ont recommencé à porter les bijoux traditionnels. Comment certaines ont recommencé à sentir qu’elles ont leur place dans la société. Comment certaines sont même retournées sur les bancs d’école (une, plus particulièrement, a même complèté une maîtrise en service social grâce à l’appui de Bala Vikasa.) Comment les enfants de certaines sont maintenant supportés dans leur éducation. Comment elles s’entraident maintenant les unes et les autres. 

Encore une fois, c’était inspirant. 

La discrimination vécue par les veuves en Inde n’est pas facile à enrayer puisque ces pensées sont ancrées dans la mentalité des gens depuis des décénnies. Toutefois, ce n’est pas parce que quelque chose est difficile à modifier que ça ne devrait pas l’être. Bala Vikasa en est un bon exemple. Changer la mentalité des gens pour le bien-être de tous ne se fait pas en claquant des doigts, mais ça demeure tout de même réalisable. 

Aucun être humain mérite de souffrir d’une telle discrimination. Nous avons tous le droit à la justice et à l’équité. Si vous y croyez réellement et que vous ouvrez vos horizons, eh bien même les plus grosses montagnes peuvent être gravies.

Nous avons besoin de gens qui prennent l’initative de changer les choses. Nous avons besoin de gens qui croient que ça ne devrait pas être rester ainsi. Nous avons besoin de gens qui en font leur cheval de bataille.

Mais c’est aussi un travail collectif de la part de tous et chacun qui habitent cette planète. Nous avons besoin que chaque individu prenne conscience que le changement se trouve en nous tous. Que le changement commence par une ouverture d’esprit et un changement d’attitude. Et ça, chers amis, nous pouvons tous le faire. Maintenant. 

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